Rorschach Test de Jay Jay Johanson

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On vient tout juste d’écouter le nouvel album de Jay Jay Johanson, intitulé Rorschach Test.

Jay jay Johanson nous réjouit une fois de plus avec ce très bel album. Le dandy suédois reste sur les fondamentaux qui ont fait sa réputation notamment sur Kings Cross paru en 2019 que nous avions adoré. Nous avions d’ailleurs pu voir Jay Jay Johanson sur cette tournée au Grand Mix de Tourcoing.

Voici donc ce nouvel album tant attendu, Jay-Jay Johanson nous ayant fait patienter avec deux singles, Roméo et Why Wait Until Tomorrow paru respectivement en février et mars et que l’on retrouve sur ce nouvel album Rorschach Test.

Mais pourquoi un tel nom pour cet album ? Pour rappel, le test de Rorschach a été crée en 1921 et consiste a montrer une série de planche de taches symétriques à un patient afin de déterminer sa personnalité. Le test a été utilisé pour détecter des troubles de la pensée sous-jacents, notamment dans les cas où les patients sont réticents à décrire ouvertement leurs processus de pensée. Le test doit son nom à son créateur, le psychologue suisse Hermann Rorschach. Chacun a pu faire cette expérience. On prend un peu de gouache que l’on met au milieu d’une feuille que l’on plie en deux et on écrase. Une fois la feuille dépliée, on vous demande ce que vous voyez. Un chien ? Une navette spatiale ? Jean Castex ? Dupont De Ligonnès ?

On imagine assez facilement que Jay-Jay Johanson ai baptisé son album ainsi afin de laisser libre cours à la personnalité de chacun, les perceptions et les sensations de l’auditeur.

Des sensations, des perceptions, chacun en aura à l’écoute de ce magnifique disque. Cependant, la ligne directrice est assez claire. JJJ (les 3 J pour Jay-Jay Johanson vous l’aurez compris je pense), nous donne du groove, du jazz, de l’electro et du piano-voix. De quoi mettre tous nos sens en éveil et en émoi. C’est beau, c’est élégant et gracieux. On y retrouve sa voix si particulière et envoûtante, cette atmosphère lente du trip-hop aux influences electro-jazz et dance. Jay Jay utilise une fois de plus les instrumentations pour mettre en valeur ses textes mélancoliques emplis de poésie.

Avec Roméo, premier titre de l’album (sorti en single) il s’agit d’une relation qui commence à s’effondrer et Jay-Jay demande à Roméo de le conseiller sur ce qu’il faut faire pour que la relation fonctionne à nouveau. C’est la première chanson qui a été écrite pour ce nouvel album. C’est une chanson qui a été créée alors qu’il se promenait, en chantant à voix haute, tout seul. Il y a eu ensuite un peu de programmation rythmique comme repère de tempo puis l’ensemble a été retravaillé en studio. Magnus Frykberg a ajouté la basse et le kickboard si caractéristique.

Why Wait Until Tomorrow (sorti également en signe) commence avec un a capella où vient s’ajouter le rythme de la batterie et les percussions. Magnus Frykberg et Jay-Jay ont ensuite ajouté une ligne de basse, un piano, des claviers et des cordes riches et profondes. Le clip est extraordinaire, Jay-Jay Johanson déambule seul dans un Paris déserté, confiné.

Sur Vertigo, on retrouve les rythmes latins de la Bossa Nova et les influences des bandes sonores des années 70.

Pour Amen, il s’agit en fait d’une improvisation sur les accords de God Save the Queen, l’hymne national de la Grande-Bretagne. Jay Jay l’a un peu modifié et a complètement changé sa structure. Et un jour, il s’est demandé pourquoi ne pas y ajouter une mélodie vocale. Il a donc commencé à fredonner la mélodie et les paroles sont venues très vite. Cette chanson a dû être écrite et enregistrée en 20 minutes.

Sur I Don’t Like You, Jay Jay Johanson fait un duo avec Sadie Percell avec laquelle il avait déjà enregistré Alone Again sur son album Poison il y a 20 ans.

Stalker, des voix lointaines comme des fantômes et des sons de claviers tourbillonnants, avec des guitares électriques qui rappellent les films noirs.

A propos de When Life Has Lost its Meaning. Jay jay Johanson raconte cette anecdote :

« Quand j’avais onze ans, peut-être douze, j’ai volé un livre dans la bibliothèque de la petite ville d’où je viens. Parce que je ne pouvais pas supporter de l’emprunter. C’était le livre « The Wild God, A Study in Suicide » d’Alfred Alvarez. Le livre traite de la mort de la poétesse Sylvia Plath et du tabou entourant le sujet du suicide. J’ai lu et relu ce livre, il a eu une énorme influence sur moi quand j’étais enfant. Le titre suédois du livre est « När Livet Mist Sin Meaning » (Quand la vie a perdu son sens) c’est le titre, traduit en anglais, de cette chanson. La chanson parle des belles choses qui me permettent de continuer quand la vie devient difficile. Un peu comme la chanson de Julie Andrews dans La mélodie du bonheur – comme « My Favourite Things » – tu sais, celle où quand elle se sent triste, elle pense à Raindrops on Rose Petals et Cat Whiskers, et ensuite elle ne se sent pas si mal. »

Andy Warhol’s Blood For Dracula est un morceau de piano sur le thème d’un des films d’Andy Warhol avec Udo Kier dans le rôle de Dracula. Ce thème vampirique est présent dans plusieurs chansons de cet album, rester éveillé la nuit, dormir toute la journée, être embrassé par les ténèbres. Même la photo de la couverture de l’album montre Jay Jay Johanson en train de dormir à la lumière du jour. En fait, la photo est une image d’un film qu’il a réalisé. La caméra est fixé au plafond juste au-dessus de son lit.

How Can i Go On, tout comme Romeo, commence par une voix et un rythme de batterie, le vétéran du jazz Joakim Milder y ajoute le saxophone et Magnus Frykberg la basse.

Cheetah, dernière chanson de l’album, est un thème au piano avec une ambiance jazz entraînante qui n’est pas sans nous rappeler le titre « Heard Somebody Whistle » en référence au single de style jazz avec le sifflet distinctif, de l’album Kings Cross de 2019.

Rorschach Test est paru le 19 mars 2021 chez Licence Kuroneko.

Structuralism d’Alfa Mist est épatant !

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Ce jeune britannique n’en est qu’à son second album mais ça sonne déjà comme un artiste à la carrière longue qui sortirait son 20ème album.
Alfa Mist (Alfa Sekitelo de son vrai nom) explique qu’il a été affecté par son environnement. Son éducation l’a façonné d’une manière qui fait qu’il ne sait pas comment communiquer. Le structuralisme signifie « je suis comme je suis à cause de la structure de la société dans laquelle j’ai grandi, maintenant j’ai besoin d’apprendre à communiquer ». L’objectif semble atteint avec « Structuralism ».

44, premier titre de l’album débute avec les commentaires en anglais d’une femme, puis se poursuit avec trompette, beat jazzy, synthés rétro. Tout y est déjà dès le premier titre. On est dans le groove, jazz, hip-hop fusion. La couleur est annoncée. Les nappes de synthés accompagnent le tic de rythme beat jazz pour accueillir au milieu du morceau la guitare électrique soliste, qui s’en donne à cœur joie. Bref 44 nous livre dès l’entrée un plat de résistance bien garni, un régal. Le morceau est long (10 minutes) et dense. Mais pas d’indigestion car la suite passe tout seul.

Falling, second morceau de l’album est feutré, nappé, élégant. Un pur régal pour les oreilles délicates. Kaya Thomas-Dyke au chant apporte toute sa douceur et sa sensualité. Le morceau se termine au piano et violoncelle pour la touche finale de cette chute en douceur.

Mulago, troisième titre débute au piano sous les commentaires en anglais d’une femme anglaise. Est-ce une redite du premier morceau ? Pas du tout ! Un morceau lent, hypnotique, voluptueux. La trompette vient compléter le trip de la ritournelle du piano qui tourne en boucle. L’auditeur est déjà sous le charme dès ce troisième morceau, impressionné par l’efficacité de la démonstration.

Glad I Lived, débute sur les commentaires d’un homme anglais. Belle présence de la batterie qui vient rythmer l’ensemble du morceau autour du saxo et du violon, et le synthé en arrière plan discret. Un morceau loin d’être simpliste, il devient en réalité de plus en plus complet tout au long des 6 minutes d’écoute. Le morceau se termine en sonorités très originales. A ré-écouter plusieurs fois pour comprendre l’ensemble de sa force.

Jjajja’s Screen, cinquième titre de l’album est un pur morceau jazz club. Trompette, guitare et synthé. C’est langoureux, de la fumée de cigarettes s’échappe de la salle, on s’attend à voir débouler un trompettiste noir dans son salon tellement l’ambiance est forte et immersive. Un aller simple pour un club de jazz new-yorkais sans bouger de son salon. Enjoy !

Nayiti, sixième titre de l’album donne la place aux cuivres. Plus de 09 minutes d’immersion pour déguster un solo de trompette accompagné de nappage de synthés. Un morceau à réserver aux inconditionnels du genre pourrait-on croire mais non, là aussi une belle surprise attend celui qui prendra le temps d’écouter le morceau dans son intégralité. La trompette laisse sa place à la guitare soliste qui se donne corps et âme ! Ce morceau est d’une très grande intensité, les 9 minutes et trente secondes ne sont pas superflues. C’est juste ébouriffant !

Retainer, septième morceau démarre lentement, quasi en procession avec batterie et cuivre. Et puis la guitare soliste vient colorer le morceau. C’est du classique, pas de surprise, c’est du connu. Mais là aussi, étonnement une deuxième partie semble se découvrir après le classique, l’attendu. Le piano ouvre la voie à la guitare électrique qui joue une partition et un son encore jamais joué sur l’album. Bref, encore une fois il faut être patient pour profiter pleinement du potentiel du morceau.

Door, huitième et dernier morceau de l’album avec Jordan Rakei est un morceau chanté, le moins jazzy de l’album, presque trip-pop, ovni par rapport aux sept autres morceaux, histoire de nous surprendre jusqu’au dernier sillon. Épatant !